AREN’ICE A CERGY-PONTOISE

Aren’Ice Cergy-Pontoise

Le conseil  communautaire de la Communauté d’Agglomération de Cergy-Pontoise (CACP) a autorisé par délibération du 17 décembre 2013 son président à signer le contrat de délégation de service public de l’équipement sportif dit Aren’ice avec le groupement d’entreprises représenté par l’UCPA. Les défenseurs de la langue française apprécieront le nom de cet ensemble.

Ce contrat a été signé le 3 février 2014. Il a une durée de 20 ans et porte sur le financement, la conception, la construction et l’exploitation de 2 patinoires et des ouvrages annexes qui permettront, entre autres, d’accueillir à partir de novembre 2016  le Centre National de Hockey et la Fédération Française de Hockey sur Glace. Sa création sera aussi mise à profit pour élargir l’offre de la CACP en sports de glace au grand public (patinage libre de loisir, scolaires…), aux 2 clubs résidents et pour favoriser l’organisation de spectacles sportifs et événementiels.

Cet équipement a été conçu par la CACP pour attirer à Cergy-Pontoise cette fédération sportive nationale qui est une association de la loi de 1901 chargée de l’exécution du mission de service public dans le domaine du sport. Son siège est actuellement à Issy-les-Moulineaux et son budget annuel est de l’ordre de 3,5 M€.

Cet organisme avait lancé en 2006 un appel à projet dans la perspective des championnats du monde de 2017 et avait retenu en 2009 le projet de la CACP.

Le présent contrat de délégation remplace le projet de contrat de partenariat public-privé, déclaré sans suite en juillet 2012 en raison des offres financièrement incompatibles des candidats. La CACP devait d’ailleurs les indemniser au titre des frais engagés par eux dans cette consultation avortée.

Au total, ce projet coûtera 42,7M€ au titre de l’investissement. Au titre du fonctionnement, il représentera pour la CACP une charge de 73M€ sur 20 ans, soit 3,65M€ par an. Cette contribution au financement des charges d’exploitation est destinée à compenser le manque de recettes payées par les usagers qui sont, au demeurant, insuffisantes pour assurer l’équilibre financer du service délégué.

Le délégataire.

Le contrat a été attribué, après appel à la concurrence et négociations, au groupement d’entreprises composé de l’UCPA, de CFA (Financière DUVAL), de FIDEPP2 (Fonds d’Investissement et de Développement des Partenariats Public-Privé de la Caisse d’Epargne), de COFELY GDF Suez Energie Services et de COFELY Finance.

Le groupement est représenté par l’UCPA, son mandataire.

Il a été retenu après un appel à la concurrence lancé en janvier 2013. La CACP a reçu 2 candidatures : le groupement UCPA et le groupement VINCI Concessions – SOC 27 qui ont été admis à déposer une offre. Vinci a renoncé à la procédure en avril 2013 et la CACP s’est retrouvée avec une seule offre sans concurrence, à savoir celle du groupement UCPA, qui a donné lieu à une série de négociations menées par le président de la CACP.  Après ces discussions, l’offre financière initiale du groupement UCPA a été réduite en fonction d’une adaptation contractualisée des prestations.

Il faut regretter cette absence inexpliquée de concurrence entre les entreprises, car seule la pression concurrentielle permet de dégager le meilleur rapport qualité-prix du service rendu à la collectivité. Il est permis, à cet égard, de s’interroger sur le renoncement du groupement VINCI Concessions à déposer une offre, après avoir fait acte de candidature : est-ce la perspective de bénéfices insuffisants ou le résultat d’une entente occulte de répartition de marchés dans le temps et l’espace entre ces opérateurs ou toute autre raison encore ?

Ceci étant, afin d’assurer l’exécution du contrat, les entreprises du groupement devront créer une société dédiée sous la forme d’une société par actions simplifiées dont le capital social sera détenu à hauteur de 1% par l’UCPA, de 5% par CFA(Financière DUVAL), de 5% par COFELY Finance et de 89% par FIDEPPP2(Caisse d’Epargne), cette dernière devant assurer l’apport de fonds propres rémunérés au taux de 12%.

Cette société dédiée devra conclure un contrat de promotion immobilière avec CFA Ile-de-France, un contrat d’exploitation avec l’UCPA et un contrat de maintenance et fournitures d’énergies et autres avec COFELY.

L’investissement.

L’investissement à la charge du délégataire, qui sera maître d’ouvrage, consiste à construire sur un terrain de 1,89 ha, situé sur la plaine des Linandes et mis à sa disposition par la CACP, un équipement sportif destiné aux sports de glace.

Il comprendra 2 patinoires, l’une plus petite pour 300 personnes et l’autre plus grande pour 3000 à 4400 personnes selon la configuration hockey ou autres spectacles.

Le délégataire construira aussi des locaux pour l’accueil des usagers et notamment de la fédération française de hockey sur glace et les parcs de stationnement.

Le coût de l’investissement est évalué à 43 M€ H .T. , dont 33 M€ pour la seule construction (valeur au 1er janvier 2014).

Pour le financer, la société dédiée bénéficiera de subventions d’investissement à hauteur de 25 M€ : 14 M€ attribués par le Conseil Régional d’Ile de France, 6 M€

par la CACP et 4 M€ par l’Etat (Ministère chargé des sports). Le Conseil Général du Val d’Oise a refusé de subventionner ce projet.

Le solde de 18 M€ sera financé à hauteur de 90% par un prêt du Crédit Foncier au taux de 3,77%, négocié par les parties en présence, et des 10% restants par les fonds propres alimentés par la FIDEPPP2 (Caisse d’Epargne).

L’exploitation.

L’exploitation de ce complexe sera assurée pour la partie sportive par l’UCPA et ses 25 salariés. Elle devra gérer, outre les spectacles événementiels, les créneaux d’utilisation des équipements et les locaux d’accueil des publics moyennant un prix des services perçus auprès des usagers.

L’offre du délégataire sera développée en direction du grand public, des scolaires, des centres de loisirs à travers, par exemple, des stages d’initiation (21 heures par semaine) et des séances de patinage libre et des animations (39 heures par semaine contre 19 actuellement). Les 2 clubs résidents bénéficieront de 3200 heures par an environ et la Fédération Française de Hockey sur glace de 1100 heures pour l’entraînement et la préparation des joueurs, les matchs internationaux et autres activités connexes.

Au plan technique, l’entretien et la maintenance et les besoins matériels seront assurés  par COFELY.

Selon la projection financière établie en valeur de janvier 2014, le total des produits d’exploitation s’élèvera à 5,532 M€, dont 1,883 M€ perçus auprès des usagers

et 3,649 M€ versés par la CACP au titre de sa contribution.

Ces produits serviront à financer les frais d’exploitation de 5,454 M€ répartis entre l’UCPA pour 2,344 M€,  COFELY pour  1,160 M€, le financement des investissements pour 1,547 M€ et les autres diverses charges pour 0,403 M€.

La différence entre les produits et les charges représentera le bénéfice annuel prévisionnel de la société délégataire évalué à  78 000 euros.

Le contribuable et l’usager.

Dans le cadre du présent contrat de délégation, le contribuable sera fortement sollicité.

Au titre des subventions qui financeront 58% des 43 M€ du programme

d’investissement, il est prévu que le contribuable national paiera 4 M€, le contribuable francilien 14 M€ et le contribuable cergypontain 6 M€.

Au titre de l’exploitation, les usagers ne financeront que 34% du coût des services rendus, laissant les 2/3 des frais à la charge du contribuable de Cergy-Pontoise représentant un montant annuel de 3,65 M€, soit 73 M€ sur les 20 ans de la durée du contrat.

Ces sommes interpellent pour plusieurs raisons.

Le complexe sportif Aren’ice a été décidé en premier lieu par la CACP pour complaire à la  la Fédération Française de Hockey sur glace qui exerce une mission d’intérêt national et force est de constater que la subvention de l’Etat s’établit, au départ, à un niveau modeste au détriment du Conseil Régional et de la CACP conduits à pallier la faiblesse de l’aide du ministère chargé des sports.

Par ailleurs, le coût global de l’investissement et du fonctionnement, à la charge de la CACP s’élèvera à 79 M€ sur 20 ans, soit une charge budgétaire annuelle de 4 M€ environ. Même s’il est logique de prendre en compte le coût actuel des sports de glace à hauteur de 1 M€ par an, il faut relever que ce surcoût annuel progressera de 3 M€, soit une hausse de 400%, à la charge du contribuable cergypontain.

S’agissant d’un service profitant à des usagers extérieurs pour une bonne part à Cergy-Pontoise et pour une autre part à une fraction limitée de la population de l’agglomération, il est paradoxal sinon anormal que la CACP doive financer sur son budget l’insuffisance du prix des services au regard de leur coût total. Ce surcoût de 3M€ représente  5% de ses recettes fiscales en provenance des impôts payés par les entreprises et les ménages.

Rappelons que la charge fiscale pesant sur les entreprises a été allégée par la réforme de la taxe professionnelle qui a été remplacée par la contribution foncière économique et la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises. Afin de compenser cette perte de recettes fiscales, la CACP a institué en 2011, pour la première fois, des taxes communautaires d’habitation et de foncier bâti qui ont accentué la pression fiscale sur les ménages et en particulier sur ceux situés en secteur Ville Nouvelle.

En effet, les logements situés en Ville nouvelle sont imposés, à catégorie de logement identique, sur la base d’un tarif  de valeur locative au m2 de 25 à 32% supérieur à celui des habitations des secteurs Village.

Comme les dotations de l’Etat et les autres ressources budgétaires sont en diminution, cette charge budgétaire supplémentaire de 3 M€ viendra peser de manière directe ou indirecte sur les impôts locaux des ménages de l’agglomération.

Pour le moins, la CACP serait bien inspirée d’ imposer au délégataire d’implanter

le siège social de sa société dédiée à Cergy-Pontoise afin de bénéficier de ses contribution foncière économique et sur la valeur ajoutée des entreprises. Ces taxes sont versées, en effet, aux collectivités du lieu du siège social.

Enfin, il est permis de s’interroger sur la genèse de cette opération. Avant sa délibération  du 17 décembre 2013 autorisant le président de la CACP à signer le présent contrat de délégation de service public, le Conseil Communautaire avait voté le18 décembre 2012 le recours à cette forme de service délégué après avis favorable émis à la majorité des membres (2 votes défavorables de 2 associations sur 10 votants) de la Commission des Services Publics Locaux en date du 14 décembre 2012 sur la base d’un rapport de la CACP. Selon ce document, la rémunération du délégataire devait être substantiellement liée aux résultats d’exploitation. Il était précisé que l’opérateur serait autorisé  à percevoir auprès des usagers des tarifs contractuellement fixés et qu’il assumerait en conséquence une part significative du risque d’exploitation. Or le présent contrat de délégation impose au délégant de prendre en charge les 2/3 des charges d’exploitation prévisionnelles. Ce pourcentage n’est pas, en première analyse, représentatif de la prise en charge par le délégataire d’une part significative du risque d’exploitation.

Dans le contexte économique actuel contraint, le pourcentage et le montant élevé de la contribution budgétaire à l’équilibre du service délégué expliquent sans doute qu’une fraction non négligeable des élus du Conseil Communautaire n’aient pas voté en faveur du contrat de délégation de service public du projet Aren’ice.

 

 

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