Les services publics locaux à Cergy-Pontoise, une solide tradition de privatisation

La plupart des 13 communes de l’agglomération de Cergy-Pontoise et la Communauté d’agglomération rechignent à exploiter en régie publique les principaux services publics locaux et préfèrent confier leur gestion à des grandes entreprises multinationales à travers des contrats de délégation (DSP) et de partenariat public-privé (PPP).

Passons en revue les principaux services gérés pour le compte des communes par la Communauté d’Agglomération de Cergy-Pontoise (CACP).

L’eau potable.

Depuis janvier 2009, le service de l’eau de toutes les communes de l’agglomération est exploité par CYO-VEOLIA dans le cadre d’un contrat unique de délégation de service public d’une durée de 18 ans prévoyant, outre le fonctionnement, la réalisation de 47 M€ d’investissements. Selon les comptes du dernier exercice annuel connu (2012), CYO a réalisé un chiffre d’affaires de 15,3M€ H.T. dégageant un bénéfice avant impôt sur les sociétés de 1,595 M€.

Le traitement des eaux usées.

Depuis juillet 1992, le traitement des eaux usées des communes de l’agglomération et de quelques communes voisines est assuré, dans la station d’épuration de Neuville-sur-Oise par CERGY-PONTOISE-ASSAINISSEMENT-VEOLIA dans le cadre d’un contrat unique de délégation de service public d’une durée de 30 ans prévoyant, outre le fonctionnement, la récente rénovation de cette usine pour 68 M€ H.T. d’investissements. Selon les comptes du dernier exercice annuel connu (2012), CERGY-PONTOISE-ASSAINISSEMENT a encaissé 10,596 M€ H.T. de recettes dégageant un bénéfice avant impôt sur les sociétés de 3,421M€.

L’élimination des ordures ménagères.

Comme pour les services publics précédents, la CACP a délégué en 1996 la gestion des déchetteries et l’élimination des ordures ménagères à la société CGECP-VEOLIA dans le cadre d’un contrat unique de délégation de service public d’une durée de 25 ans. Outre le fonctionnement, ce contrat prévoyait la création, entre autres, du centre de tri et de l’usine d’incinération de Saint-Ouen l’Aumône (75M€ H.T. d’investissements totaux pour l’ensemble des installations de la filière dite Auror’Environnement). Ces installations desservent aussi les communes des syndicats TRI-ACTION (Taverny…) et SMIRTOM (Vigny et communes du Vexin) Selon les comptes du dernier exercice annuel connu (2012), la société CGECP-VEOLIA a encaissé pour l’ensemble de son activité 30,38 M€ H.T. de recettes se soldant par une perte de 168 000€. Cette perte est imputable à la panne de l’unité de production d’électricité qui a privé l’exploitant de recettes substantielles en 2012.

Le chauffage urbain.

Depuis mi-décembre 2006, la CACP a délégué la gestion du chauffage urbain des communes de Cergy, Pontoise, Eragny et Saint-Ouen l’Aumône à la société CYEL-VEOLIA dans le cadre d’un contrat unique de délégation de service public d’une durée de 16 ans prévoyant, outre le fonctionnement, la réalisation de 25 M€ TTC d’investissements. Selon les comptes du dernier exercice annuel connu (2012), CYEL a réalisé un chiffre d’affaires de 19,87 M€ H.T. et une perte d’exploitation de 6 M€. Cette perte s’explique en partie par l’arrêt, pour panne, de la chaudière emblématique « Bois » pendant de longs mois en 2011 et par la réalisation de travaux d’entretien et de renouvellement plus importants que prévu..

Les parcs de stationnement.

Depuis juin 2010, la CACP a délégué la gestion des 23 parcs de stationnement à la société VINCI Park dans le cadre d’un contrat unique de délégation de service public d’une durée de 8 ans prévoyant, outre le fonctionnement, la réalisation de 1,95 M€ TTC d’investissements. Selon les comptes du dernier exercice annuel connu (2012), VINCI Park a encaissé une recette de 2,12 M€ H.T. dégageant un bénéfice avant impôt sur les sociétés de 396 000 €.

Les transports urbains de voyageurs.

Le service de transport urbain des voyageurs de l’agglomération de Cergy- Pontoise est exploité par la STIVO, société du groupe LACROIX, sous l’égide du Syndicat des Transports d’Ile-de-France (STIF) dans le cadre d’une convention de partenariat tripartite STIF- CACP- STIVO. A l’intérieur de cette convention par un contrat de délégation de service public de forme spécifique, d’une durée de 10 ans et venant à échéance en 2016, le STIF a confié à la STIVO l’exploitation du service public des transports urbains de Cergy-Pontoise pour un coût annuel de 35M€ H.T.(valeur 2008). La recette commerciale par voyage est de l’ordre de 2 €, dont 0,10€ de bénéfice au profit de la STIVO.

L’éclairage public

Par délibération du 4 juin 2013, le Conseil communautaire a autorisé le président de la CACP à signer un contrat de partenariat public-privé (PPP) avec le groupement d’entreprises composé des sociétés Vinci Energies et SPIE qui ont créée la société dédiée Cylumine. Ce contrat, d’une durée de 18 ans, délègue à Cylumine la mission de financer, construire, rénover et gérer l’ensemble du réseau d’éclairage public des 13 communes de l’agglomération en se fixant l’objectif de réduire de 25% le montant de la facture énergétique. Le montant total du contrat est estimé à 187 M€, Ce type de contrat est a priori plus pernicieux puisque la collectivité devra payer à son cocontractant un prix destiné à payer, outre les charges de fonctionnement et le coût des investissements, les intérêts d’emprunts mobilisés pour financer les investissements.

Le projet en cours du Centre National de Hockey sur Glace : Aren’Ice

Par délibération du 17 décembre 2013, le Conseil communautaire a autorisé le président de la CACP à signer un contrat de délégation de service public avec un groupement d’entreprises, dont le mandataire est l’UCPA. Ce contrat, d’une durée de 20 ans, lui délègue la mission de financer, construire et exploiter le complexe sportif du Centre National de Hockey sur Glace, baptisé Aren’ice et dédié au hockey et au patinage sur glace. Situé sur un terrain de 1,89 ha de la plaine des Linandes, ce centre pourra accueillir le grand public, les scolaires, les 2 clubs de hockey résidents et aussi la Fédération Française de Hockey sur glace. Cette dernière y devrait installer son siège et utiliser les patinoires pour l’entraînement et les matchs de l’équipe de France, notamment lors des championnats du monde en 2017. Le coût de l’investissement est estimé à 43 M€, financé par des subventions du Conseil Régional (14 M€) de l’Etat (4 M€) et de la CACP (6 M€). Le délégataire percevra, au titre du fonctionnement, le prix des services rendus qui ne représentera que le tiers environ du montant des charges. Les 2/3 restants seront financés par une contribution de la CACP d’un montant annuel de 3,65 M€ représentant une somme de 73 M€ sur 20ans à la charge du contribuable cergypontain. 

NB : Cette politique de privatisation quasi-systématique des principaux services publics locaux interpelle à plus d’un titre. La CACP est amenée en pratique à contracter avec des grandes entreprises multinationales comme VEOLIA et VINCI qui jouissent d’une position prééminente, sinon dominante, sur leurs marchés. Leur priorité première est de servir les plus forts dividendes possibles à leurs actionnaires en cultivant, au détriment vraisemblable des usagers, une rente substantielle à l’abri de la concurrence grâce à des contrats de longue durée. Rappelons pour information que VEOLIA représentait en 2012 un chiffre d’affaires annuel H.T. de 30 milliards d’euros pour un total de bilan de 44 milliards et que VINCI affichait, pour sa part, 39 milliards de chiffre d’affaires pour 60 milliards de «pied de bilan». Au regard de l’importance de ces chiffres, il est permis de douter que la CACP puisse imposer sa volonté à ses entreprises cocontractantes.

Il paraît évident que la gestion de ces services en régie publique par la CACP serait de nature à favoriser les intérêts des habitants. En effet, les délégataires recherchent la profitabilité maximale et n’ont aucun intérêt financier à encourager les comportements vertueux de nature à protéger la ressource et préserver l’environnement et, s’ils le font, ils demandent une solide compensation. A l’inverse, les régies publiques peuvent adapter leur gestion et leurs tarifs en fonction de l’intérêt général et des usagers. Au surplus, elles n’ont pas à financer, comme les entreprises privées, les bénéfices destinés à alimenter les dividendes des actionnaires, l’impôt sur les sociétés, la rémunération des hauts dirigeants et des conseils d’administration, les frais de siège, la prospection commerciale, la croissance externe et bien d’autres charges encore comme des frais de personnel souvent plus importants.

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